Page:Lissagaray - Jacques Bonhomme, Armand Le Chevalier, 1870.djvu/134

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l’administration, aubergiste, limonadier, débitant, marchand forain, c’est la ruine. Le jour du scrutin, le paysan est entouré. Pour qui votez-vous ? On prend, on déplie son bulletin. « C’est bien, » dit le garde champêtre, ou : « Ce n’est pas le bon, » et on le change. Il n’est pas rare que le président du bureau apostrophe violemment l’électeur.

Et les fausses clefs, et les urnes violées ! Dans certains endroits on attribue au candidat de Napoléon III plus de voix qu’il n’y a d’électeurs dans la commune. Et les menaces, souvent effroyables ! Dans un des départements les plus ravinés par le coup d’État, les Basses-Pyrénées, les gendarmes disent : « Les vapeurs chauffent à Port-Vendre. Si vous votez pour Arago, Cayenne et Lambessa vous attendent. » Ailleurs, l’administration fait courir le bruit que le candidat opposant est arrêté sous l’inculpation d’attentat à la pudeur. Ah ! j’ai vu de près, dans la campagne, ce qu’on appelle la lutte électorale. C’est un vrai massacre. D’un côté, des hommes, combattants loyaux, la poitrine découverte, de l’autre, la calomnie, l’intimidation, la violence pour balles et boulets, et la plus terrible de toutes