Page:Lissagaray - Jacques Bonhomme, Armand Le Chevalier, 1870.djvu/25

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limaces, des charognes et d’autres ordures, sont plus semblables à des morts qu’à des vivants. »

« En entrant à Vendôme, dit un prêtre, j’ai été assiégé par cinq ou six cents pauvres qui ont des visages cousus et livides, les viandes dont ils se nourrissent produisant sur leurs figures un limon qui les défigure étrangement. »

Dans la Touraine : « Il y a des lieux où de quatre cents feux il ne reste que trois personnes. Depuis peu un enfant, pressé de la faim, arracha et coupa avec ses dents un doigt à son frère, qu’il avala, n’ayant pu lui arracher une limace qu’il avait avalée. Il s’en trouva de si faibles que les chiens les ont en partie mangés. À Beaumont-la-Ronce, le mari et la femme étaient couchés sur la paille et réduits à l’extrémité ; la femme ne put empêcher les chiens de manger la figure de son mari. »

Je m’arrête, Jacques Bonhomme. Qui avait fait cet épouvantable charnier ? La famine, la rigueur du sol ? Non, — la cruauté du maître. La grêle, les inondations, les sécheresses étaient plus clémentes aux serviteurs de la terre que les intendants de province, les grands seigneurs et