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Page:Lissagaray - La Vision de Versailles.djvu/23

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soldats de l’Europe. Douze mille officiers nobles émigrés guidaient leurs armées à travers les sentiers de la France ; nos régiments manquaient de cadres ; nous ne tenions pas comme vous soixante départements intacts, les provinces obéissantes, des ressources d’argent inépuisables, des arsenaux, des ateliers tels que Toulon, Brest, Marseille, Bordeaux, Lyon, Lille, Nantes, vingt autres grandes villes, les mers libres, et les sympathies de toute la terre. Et cependant nous vainquîmes. C’est que nous avions la passion de notre cause, la foi dans le peuple, la volonté de l’affranchir, le mépris de notre mémoire, pourvu qu’il survécût à notre sort. C’est qu’au lieu d’abdiquer entre quelques mains chétives, nous laissions parler le génie vigoureux de la nation ; au lieu de proscrire les ardeurs révolutionnaires, nous savions les condenser et en faire jaillir la foudre ; au lieu de supplier les nobles, les prêtres, nos ennemis-nés, d’aider notre délivrance, au lieu de leur demander humblement leur concours, nous prenions leurs têtes et leurs châteaux.

« Pour amnistier vos lâchetés, vous rejetez la catastrophe sur le dernier régime. N’est-ce donc pas vous qui l’avez fondé et maintenu vingt ans ? N’avez-vous pas acclamé le coup d’État ! Vos prêtres ne l’ont-il pas béni, vos industriels exploité ? La veille de