Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/38

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tenus par leur artillerie, nécessairement muette, auraient dû, sous la grêle des balles et des mitrailleuses, descendre les fossés, les traverser, gravir les remparts et les emporter à la baïonnette. — Les Prussiens ne l’ont pas rêvé. Pouvait-on raisonnablement l’attendre de ces jeunes soldats versaillais, incapables, après deux mois d’attaques renouvelées, d’enlever de vive force à quelques francs-tireurs le village de Neuilly ? M. Thiers a pu enfler ses bulletins ; il n’en est pas moins vrai que, pour qu’il entrât dans Paris, il a fallu, d’un côté, l’ineptie absolue des états-majors, l’indiscipline toujours croissante, la coupable indolence de certains officiers chargés des avant-postes ; et de l’autre, pour soumettre les rues, cent trente mille hommes luttant contre douze mille. Se glorifier d’être entré par une trahison, après deux mois de siège et de bombardement infructueux, dans une ville ainsi gardée, ainsi défendue, de l’avoir subjuguée à plus de dix contre un, c’est triompher à bon compte et prêter à sourire aux hommes de guerre sérieux.

Dix heures. — Vingt-cinq mille Versaillais sont dans Paris, et Paris l’ignore ! Le ciel resplendissait et les boulevards avaient repris leur ancienne animation. Si « une des plus