Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/100

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du style et au risque de ne pas paraître docte ou profond. J’ai été effrayé, lorsqu’un ami, qui avait parcouru quelques chapitres, me dit qu’il y avait trouvé de beaux passages. Le beau style ne convient pas à l’économie politique. Ce n’est pas une qualité, c’est un défaut dans les ouvrages de ce genre, car on n’en abuse que trop souvent pour déguiser une logique vicieuse ou faible ou pour faire admettre des sophismes comme des arguments solides et profonds. La clarté, la simplicité, telles sont dans cette science les qualités essentielles. Les déductions qui ont un air de profondeur, les phrases ambitieuses et les expressions recherchées ne sont employées que par ceux qui manquent de la sagacité nécessaire pour bien connaître la nature des choses, par ceux qui ne se comprennent pas eux-mêmes, et qui, par suite, ne sont pas capables de se faire comprendre des autres.

Je ne me suis pas conformé non plus à la mode des citations fréquentes. J’ai lu cent fois plus d’écrits que je n’en ai mentionné. Mais je crois avoir remarqué que la plupart des lecteurs qui ne font pas profession de science, et peut-être les plus intelligents et les plus avides de s’instruire, éprouvent de cruelles angoisses lorsqu’on leur présente des légions de témoins et d’autorités. Je ne voulais pas non plus employer inutilement la place qui m’était si nécessaire. Je suis loin de prétendre que les citations multipliées n’aient pas un grand prix dans des manuels et dans des ouvrages de recherches historiques ; je veux qu’on sache seulement que je n’ai pas voulu composer un manuel.

Il y a lieu de croire que je rends à la bureaucratie allemande un service assez signalé, en lui fournissant une théorie conforme à sa pratique et en faisant ressortir les erreurs de gens qui ne l’ont jamais traitée avec beaucoup de respect. Certes, la division qui règne entre la théorie et la pratique n’a jamais été très-favorable à l’autorité des chancelleries. L’étudiant le plus inexpérimenté, dont les cahiers cosmopolites ont à peine eu le temps de se sécher, se croit tenu de sourire avec mépris, chaque fois qu’un conseiller plein d’expérience ou un