Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/145

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C’est ainsi qu’Élisabeth traita ces marchands, dont son père et tant d’autres rois d’Angleterre avaient emprunté les bâtiments pour livrer leurs batailles ; à qui tous les potentats de l’Europe avaient fait la cour ; qui, pendant plusieurs siècles, avaient eu pour vassaux les rois de Danemark, et de Suède, les avaient, suivant leur bon plaisir, mis sur le trône et déposés, avaient colonisé et civilisé toutes les côtes sud-est de la Baltique et expulsé les pirates de toutes les mers ; qui, à une époque encore peu éloignée, avaient, l’épée à la main, forcé un roi d’Angleterre de reconnaître leurs privilèges ; à qui, plus d’une fois, les rois d’Angleterre avaient donné leur couronne en gage, et qui avaient poussé vis-à-vis de ce royaume la cruauté et l’insolence jusqu’à noyer cent pêcheurs anglais qui avaient osé approcher de leurs pêcheries. Les Anséides étaient encore assez puissants pour se venger de la reine ; mais leur ancien courage, leur brillant esprit d’entreprise, la force qu’ils puisaient dans la liberté et dans l’association, tout cela avait disparu. Ils s’affaiblirent chaque jour davantage, et finirent en 1630 par dissoudre formellement leur ligue, après avoir mendié dans toutes les cours européennes des privilèges pour le commerce d’importation et essuyé partout un humiliant refus.

Diverses causes extérieures, indépendamment des intérieures dont nous parlerons plus loin, contribuèrent à leur chute. Le Danemark et la Suède, voulant se venger de l’asservissement dans lequel cette ligue les avait si longtemps tenus, entravèrent par tous les moyens le commerce des Anséates. Les czars de Russie avaient octroyé des privilèges à une compagnie anglaise. Les ordres de chevalerie, leurs alliés séculaires et comme les enfants de la Hanse, étaient en décadence et en dissolution. Les Hollandais et les Anglais les chassèrent de tous les marchés, les supplantèrent dans toutes les cours. La découverte de la route du Cap de Bonne-Espérance leur fit aussi beaucoup de tort.

Eux qui, dans les jours de la puissance et de la prospérité, s’étaient rappelé à peine qu’ils appartenaient à l’empire