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de Gascogne s’étaient distingués dans la fabrication du fer, dans la navigation et dans la pêche de la baleine ; en 1619, ils y étaient encore si supérieurs aux Anglais, que ceux-ci leur envoyèrent des pêcheurs pour faire auprès d’eux leur éducation[1].

Déjà au dixième siècle, sous Abdoulrahman III, de 912 à 950, les Maures exploitaient dans les plaines fertiles de Valence de grandes plantations de colon, de sucre et de riz, et produisaient de la soie. Séville et Grenade offraient, au temps des Maures, d’importantes fabriques de coton et de soie[2]. Hérencia, Ségovie, Tolède et plusieurs autres villes de Castille se distinguaient par leurs manufactures de laine. Séville seule compta jusqu’à 16.000 métiers à tisser, et les manufactures de laine de Ségovie occupaient en 1552 13.000 ouvriers. Toutes les autres branches d’industrie, notamment la fabrication des armes et celle du papier, s’étaient développées dans la même proportion. Jusqu’au temps de Colbert, les Français liraient les draps fins d’Espagne[3]. Les ports maritimes de cette contrée étaient animés par un grand commerce, par une pêche maritime active, et, jusqu’à Philippe II, sa marine était de toutes la plus puissante. En un mot, l’Espagne était pourvue de tous les éléments de la grandeur et de la prospérité, lorsque le fanatisme religieux, ligué avec le despotisme, se mit à l’œuvre pour étouffer le génie de la nation. Cette œuvre de ténèbres fut commencée par l’expulsion des Juifs et terminée par celle des Maures ; deux millions des plus industrieux et des plus riches habitants furent ainsi chassés d’Espagne avec leurs capitaux. En même temps que l’Inquisition s’appliquait ainsi à exiler l’industrie du pays, elle empêchait avec un entier succès l’établissement de fabricants étrangers.

La découverte de l’Amérique et de la route par le cap de Bonne-Espérance n’augmenta qu’en apparence et momenta-

  1. Anderson, vol. I, p. 127. — Vol. II, p. 350.
  2. M. C. G. Simon, Recueil d’observations sur l’Angleterre. — Ustaritz, Théorie et pratique du commerce.
  3. Chaptal, De l’industrie française, vol. II.