Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/260

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lesquelles on l’emploie, mais ses investigations sur les causes de cette adresse et de cette intelligence ne le conduisent pas au delà de la division du travail, qu’il explique uniquement par l’échange, par l’accroissement du capital matériel et par l’extension du marché. Ainsi sa doctrine devient de plus en plus matérialiste, particulière et individuelle. S’il avait poursuivi l’idée de force productive sans se laisser dominer par celle de valeur, de valeur échangeable, il serait arrivé à comprendre qu’à côté d’une théorie des valeurs, une théorie indépendante des forces productives est nécessaire pour expliquer les phénomènes économiques. Mais il s’est égaré jusqu’à expliquer les forces morales par des circonstances purement matérielles, et de là découlent toutes les absurdités et toutes les contradictions dont son école, ainsi que nous le montrerons, est coupable jusqu’à ce jour, et qui sont la cause unique pour laquelle les leçons de l’économie politique ont trouvé si peu d’accès dans les meilleurs esprits. L’école de Smith n’enseigne autre chose que la théorie des valeurs, et c’est ce qui ressort de cette idée de valeur échangeable qui sert partout de base à sa doctrine, et de la définition même qu’elle donne de la science.

C’est, d’après J.-B. Say, la science qui enseigne comment les richesses ou les valeurs échangeables se produisent, se distribuent et se consomment. Évidemment, ce n’est pas là la science qui apprend comment les forces productives sont éveillées et entretenues, et comment elles sont comprimées ou anéanties. Mac Culloch l’appelle expressément la science des valeurs, et de récents auteurs anglais la désignent sous le nom de science de l’échange[1].

  1. Il y a plusieurs observations à faire sur ce passage. J’admets volontiers qu’Adam Smith n’a pas tiré de l’idée de force productive tout le parti possible ; mais, loin de l’avoir méconnue, il l’a très-nettement comprise, au contraire. Qu’est-ce que sa division du travail, sinon un moyen efficace d’augmenter notre puissance productive ? Ne revient-il pas fréquemment sur la sécurité générale en tant que condition nécessaire de la fécondité du travail ? Bien qu’Adam Smith n’ait pas établi scientifiquement, à proprement parler, le travail comme source unique de la richesse, et que, pour désigner la ri-