Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/343

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sède le monopole naturel ; et il est plus que vraisemblable que deux ou trois fois plus de terres eussent été mises en culture qu’il n’en a été mis à l’aide des restrictions. On peut en voir la preuve dans le voisinage d’une grande ville. Quelque masse de denrées que cette ville fasse venir de loin, on ne trouvera pas à une distance d’un mille un coin de terre inculte, si maltraité qu’il ait été par la nature. Qu’on y défende l’importation des grains de localités éloignées, l’on ne fera par là que diminuer la population, son industrie, sa prospérité, et obliger les fermiers du voisinage à adopter des cultures moins avantageuses.

On voit qu’en ce point nous sommes parfaitement d’accord avec la théorie régnante. En ce qui touche les produits agricoles, l’école a toute raison de soutenir que la liberté du commerce la plus étendue est, dans tous les cas, profitable à la fois aux individus et aux États. On peut, il est vrai, encourager la production par des mesures restrictives ; mais l’avantage qu’on obtient par ce moyen n’est qu’apparent. On ne fait ainsi, suivant le langage de l’école, que donner aux capitaux et au travail une autre direction moins avantageuse. Mais l’industrie manufacturière obéit à d’autres lois, et c’est ce que malheureusement l’école n’a pas aperçu[1].

  1. On s’explique mal comment le système protecteur, qui, d’après List, est si utilement applicable à l’industrie manufacturière, n’aurait que de fâcheux effets à l’égard de l’agriculture ; comment, en pareille matière, chacune de ces deux grandes branches de travail obéirait à des lois différentes ; comment la liberté suffirait à celle-ci, lui serait même indispensable, tandis que celle-là ne pourrait pas se passer de secours ; comment enfin les mêmes arguments de l’école seraient détestables dans un cas et excellents dans un autre.
      Quel que soit le produit brut ou manufacturé dont la loi restreint l’importation, les effets, bons ou mauvais, sont toujours les mêmes. Une perte temporaire de valeurs est toujours causée ; il s’agit de savoir si elle est rachetée. Comme s’exprime l’auteur du Système national, par un accroissement des forces productives. Or, l’acquisition d’une grande industrie rurale augmente-t-elle la puissance productive d’un pays à un moindre degré que celle d’une grande industrie manufacturière ?
      Suivant List, l’agriculture, à l’état primitif, est puissamment excitée par le Commerce extérieur ; plus tard, c’est avant tout de l’industrie manufactu-