Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/354

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trie nationale. La société affaiblirait ainsi en elle la faculté d’acquérir des capitaux, car les capitaux ne peuvent être formés qu’au moyen des épargnes réalisées par la nation sur ses revenus annuels ; or, le développement de l’industrie nationale dépend de la quantité de ces capitaux, et c’est seulement dans la proportion de ceux-ci qu’elle peut grandir. La société affaiblit donc sa puissance industrielle, lorsque, par ces mesures, elle fait naître une industrie qui fût venue d’elle-même, si l’on eût laissé aux choses leur libre cours.

Remarquons, en premier lieu, que, dans ce raisonnement, Adam Smith emploie le mot capital dans le même sens où les rentiers et les négociants ont l’habitude de le prendre pour leur tenue de livres et pour l’établissement de leur balance, à savoir comme le total de leurs valeurs échangeables en opposition aux revenus qu’ils en retirent.

Il oublie que lui-même, dans sa définition du capital, comprend sous ce terme les facultés morales et physiques des producteurs[1].

Il soutient à tort que les revenus d’une nation dépendent uniquement de la quantité de ses capitaux matériels. Son ouvrage prouve, en mille endroits, que ces revenus dépendent principalement de la masse des forces intellectuelles et corporelles de la nation, ainsi que de ses progrès sociaux et politiques, surtout de ceux qui résultent d’une division plus parfaite du travail et de l’association des forces productives du pays, et que, si des mesures de protection entraînent pour quelque temps un sacrifice de richesses matérielles, on en est dédommagé au centuple en forces productives, en moyens d’acquérir des valeurs échangeables, et que, par conséquent, ce sacrifice n’est qu’une dépense reproductive de la nation.

Il oublie que le moyen pour une nation d’augmenter la

  1. On ne saurait désigner sous le nom de capital les facultés morales et physiques. Outre que c’est dégrader l’homme que de l’assimiler à une machine, ces facultés se rattachent naturellement à un autre des trois grands facteurs de la production, le travail. Ce n’est que par métaphore qu’on a pu dire que l’homme est un capital accumulé. (H. R.)