Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/552

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les Indes occidentales et dans l’Amérique du Sud, soit que dans ces dernières régions la culture soit pratiquée par des noirs libres ou par des esclaves ; que, par conséquent, la production des Indes orientales, dès que le commerce y aura été affranchi et que de sages principes d’administration y auront prévalu, doit s’accroître énormément, et que le temps n’est pas éloigné où l’Angleterre en tirera non-seulement toutes les denrées coloniales nécessaires à sa consommation, mais encore des quantités immenses à verser sur les autres pays. Ainsi, en diminuant la production des Indes occidentales et de l’Amérique du Sud où les autres pays envoient des produits fabriqués, l’Angleterre ne peut essuyer aucune perte ; elle sera, au contraire, en bénéfices si la production des denrées tropicales prend de gigantesques proportions dans un marché dont ses manufactures ont l’approvisionnement exclusif. Quatrièmement enfin, on a soutenu que, par l’émancipation des esclaves, l’Angleterre a voulu suspendre un glaive sur la tête des États à esclaves de l’Amérique du Nord, que les dangers augmentent pour l’Union à mesure que cette émancipation gagne du terrain et éveille chez les nègres du pays le désir de la même liberté.

À y regarder de près, une expérience philanthropique d’un résultat si incertain pour ceux mêmes en faveur desquels elle a été faite, ne paraît rien moins qu’avantageuse pour les nations appelées à commercer avec l’Amérique du Sud et avec les Indes occidentales, et ce n’est pas sans motif qu’elles pourraient poser ces questions : Le passage subit de l’esclavage à la liberté n’est-il pas plus nuisible aux nègres eux-mêmes que le maintien de leur condition actuelle ? Une suite de générations n’est-elle pas nécessaire pour former au travail libre des hommes accoutumés, pour ainsi dire, au joug de la brute ? Ne vaudrait-il pas mieux opérer la transition de l’esclavage à la liberté au moyen d’un bon système de servage assurant au serf certains droits au sol qu’il cultive et une juste part des fruits de son labeur, et laissant en même temps au propriétaire une autorité suffisante pour habituer le serf à l’or-