Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/304

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on se figura presque que son abattement allait se dissiper. Il crut peut-être lui-même, ou feignit de croire, qu’il parviendrait à le vaincre en jetant tout dans l’oubli, jusqu’à ses habitudes passées ; en négligeant les prescriptions des médecins, les précautions qui lui rappelaient son état maladif. Il joua deux fois en public et maintes fois dans des soirées particulières. Chez la duchesse de Sulherland, il fut présenté à la reine ; après cela, tous les salons distingués recherchèrent plus encore l’avantage de le posséder. Il alla beaucoup dans le monde, prolongea ses veilles, s’exposa à toutes les fatigues, sans se laisser arrêter par aucune considération de santé. Voulait-il ainsi en finir de la vie, sans paraître la rejeter ? Mourir, sans donner à personne ni le remords, ni la satisfaction de sa mort ?

Il partit enfin pour Edimbourg, dont le climat lui fut particulièrement nuisible. A son retour d’Ecosse, il se trouva très-affaibli ; les médecins l’engagèrent à abandonner au plus tôt l’Angleterre, mais il ajourna longtemps son départ. Qui pourrait dire le sentiment qui causait ce retard ?… Il joua encore à un concert donné pour les Polonais. Dernier signe d’amour envoyé à sa patrie, dernier regard, dernier soupir et dernier regret ! Il fut fêté, applaudi et entouré, par tous les siens. Il leur dit à tous un adieu qu’ils ne croyaient pas encore devoir être éternel.

Quelle pensée occupait son esprit lorsqu’il traversait la mer pour rentrer dans Paris ?… Ce Paris, si différent