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le poëme de Lohengrin, au-dessus de tous ceux que Wagner a faits jusqu’ici. Son mérite littéraire suffirait pour placer son auteur parmi les écrivains hautement doués du sens tragique. A côté des vers du sentiment le plus touchant, des exclamations les plus heureusement trouvées, d’un dialogue où les secrètes impulsions des personnages sont trahies par un serpentement de pensée très-habile, la versification en est non-seulement sonore et belle, le style élevé et approprié aux caractères, mais de plus ce drame emprunte un singulier reflet de moyen âge à la reproduction du vieux langage allemand, à l’emploi de ses anciennes tournures, au fréquent retour de ces mots d’autrefois, qui sans être complétement oubliés, portent cependant un cachet de vétusté. Il faut aussi louer le tact et le bon goût avec lesquels cette imitation est bornée à des nuances aisées à saisir, pour ceux même qui ne sont point initiés aux secrets d’un archaïsme érudit ; elle n’est jamais poussée au point de rendre le poëme d’une difficile compréhension. Mais non content de rappeler à l’oreille les anciennes assonances, Wagner a poursuivi cette imitation dans sa manière de disposer les lettres, qui, comme dans les anciens poëtes, Wolfram von Echenbach et autres, ne sont point majuscules au commencement de chaque vers. Ce simple détail frappe déjà l’œil qui parcourt les pages du livret. La concordance de toutes ces im-