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« Chevalier, une fraternelle amitié,
     » Ce cœur vous l’a vouée.
     » N’en exigez pas d’autre,
» Car cela me serait une douleur !
     » Sans trouble je vous vois approcher
     » Ou bien vous éloigner ;
» Et les larmes silencieuses de vos yeux,
» Je ne saurais les comprendre. »[1]


Mais, comme le chevalier Toggenburg, lors même qu’il n’était pas aimé, il continuait d’aimer, et cette abnégation qui affaisse l’âme par la surexcitation, et son énergie latente, se trahit dans son chant, rempli d’une muette adoration pour ce sentiment qui dans sa simplicité navrante se contente d’exister.

Tannhäuser se lève pour dire « qu’il comprend et admire cette forme du sentiment, mais que cette prostration d’espérances et de désirs n’est qu’un résultat souffrant, douloureux, maladif, des luttes de notre existence ; que dans la plénitude de ses facultés, l’homme veut posséder ce qui l’attire, et jouir de toutes les jouissances dont il se sent ca-


  1. « Ritter, treue Schwesterliebe,
    » Widmet euch dies’ Herz ;
    » Fordert keine andre Liebe,
    » Denn es macht mir Schmerz.
    » Ruhig mag ich euch erscheinen,
    » Ruhig gehen sehen.
    » Eurer Augen stilles Weinen
    » Kann ich nicht verstehn. »