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l’adjectif que la reconnaissance ou la trémeur ajoute à un nom béni ou redouté, perdit sa superstitieuse exagération, aussi bien que cette lie de crainte et de terreur, qui se mêlait aux supplications et aux sacrifices offerts à ceux, en qui on reconnaissait une puissance, dont on ne devinait pas les bornes. Des institutions toujours plus élaborées réglant les sociétés, la faiblesse individuelle fortifiée par leur force collective, trouva dans leur sein des garanties moins précaires à sa sécurité, et les nations ne se refugièrent plus autour des hommes supérieurs, comme dans l’enceinte d’un asyle protecteur. On ne se prosterna plus devant eux comme devant des êtres surnaturels ; mais au frissonnement de la surprise succéda une admiration exaltée, et on les glorifia en les appelant des Héros et des Sages. Leurs actions étaient répétées, leurs paroles recueillies, et l’étonnement ravi des contemporains léguait aux générations suivantes, les récits de leurs hauts faits. Frappée de leur grandeur, l’imagination populaire groupait peu à peu autour de leurs mémoires, des incidens et des événemens analogues aux aventures réelles de leur vie, multipliant ainsi leur titres à la gloire, et leur créant un piédestal pœtique richement ciselé de bas reliefs allégoriques, audessus duquel leur image s’élevait aux regards de la postérité, haute et idéalisée.