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d’ordinaire parus assez bons, pour servir d’étoffe aux plus admirables chefs-d’œuvre du génie musical. N’est-il donc point temps que les compositeurs se refusent à accepter des livrets pareils à ceux que Voltaire stigmatisait, par la sanglante raillerie du bon mot, si répété depuis : « Ce qui serait trop sot pour être dit, on le chante. » Quant à nous, s’il advenait une extrémité où de deux maux, il fallût choisir le moindre, nous pensons que le plus léger, le moins fâcheux et le moins long, serait encore d’entendre débiter d’une voix naturelle, ce qui serait trop sot pour être chanté.

Ainsi que nous l’avons dit, le livret du Lohengrin est en lui-même une œuvre dramatique, qui renferme des beautés du premier ordre. Pour bien comprendre la marche de la pièce au théâtre, et saisir l’intention et la portée de la musique dès les premières mesures de l’introduction, il faut connaître d’avance le mystère sur lequel roule toute l’action du drame, où il ne se dévoile qu’à la dernière scène. Ce mystère repose sur la tradition du S’ Graal qu’on trouve dans les romans de chevalerie, et qui occupe une grande place, dans les poëmes de Wolfram d’Eschenbach. Le sujet du Lohengrin est extrait d’un de ces poëmes. Tout le squelette des événemens en est pris, avec de très-légères modifications, nécessitées par les convenances de la