Page:Liszt - Pages romantiques, 1912, éd. Chantavoine.djvu/149

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par une imagination irrassasiable. Du fond de leur sous-préfecture, ils ont sondé les abîmes de la science ; y ayant trouvé le vide et le néant de leur propre cervelle, ils s’en vont de par le monde promener leurs grandes phrases et leurs petits personnages, le tout afin de jouer le Childe-Harold auprès de quelque bourgeoise amoureuse, ou le don Juan auprès de quelque femme de chambre peu farouche. Vous jugez si mon ami se défendait de ces fâcheux pèlerins. La consigne la plus sévère était donnée et maintenue. Un jour, néanmoins, un d’eux parvint à tromper le nez des chiens et la vigilance des sentinelles Il avait franchi inaperçu les premières enceintes et se trouvait dans l’intérieur même du château, bien décidé à ne pas lâcher pied, à ne se payer d’aucune défaite. Il savait que la maîtresse du logis, ayant des hôtes chez elle, ne pouvait s’absenter pour longtemps ; il annonça tout d’abord la résolution inébranlable de l’attendre, fût-ce bien avant dans la nuit. C’était un avocat sans cause ; nous étions en plein clair de lune ; rien ne l’empêchait d’effectuer sa menace. Force était d’inventer un nouveau stratagème qui nous délivrât, une fois pour toutes, des voyageurs byroniens. Ce ne fut pas long. Le jardinier avait en ce moment chez lui sa belle-sœur, ancienne femme de chambre de l’ex-célèbre Mme S. G. Célestine Cramer était devenue, durant le long exercice de son camériérat artistique, un individu à part, qui participait de plusieurs espèces, et résumait un grand nombre de types divers. Elle