poêles et les artistes comme des êtres en dehors de toute réalité, ne se repaissant que de chimères, endormis comme Brahma dans des ténèbres lumineuses. Lamartine juré, Lamartine membre du conseil général, Lamartine député, est pour beaucoup de gens[1] une anomalie, un problème ; les braves gens en sont à Pégase et à l’Hélicon ; ils ne s’aperçoivent point encore que, dans nos civilisations modernes, le poète et l’artiste ne sont plus de glorieux parias que leur génie séquestre du reste de l’humanité, mais, au contraire, des hommes vivant de la vie de tous, aimant, souffrant, travaillant en communion avec ceux qui aiment, qui travaillent, qui souffrent ; au demeurant, tout aussi peu fantastiques dans leurs mœurs et leurs habitudes, que le plus inoffensif bourgeois de Carpentras ou de Tarascon. Étranges choses ! direz-vous, que ce préjugé populaire, posant en fait, malgré l’expérience et le raisonnement, qu’un homme, par cela seul qu’il est doué de facultés supérieures, doit être dépourvu du simple bon sens nécessaise au maniement des affaires civiles et politiques ! Étrange ? non : qui ne sait que les préjugés qui flattent la médiocrité s’établissent avec une facilité merveilleuse, et cela en raison directe de leur absurdité ? Qui n’a été témoin de l’incroyable vitesse avec laquelle circulent les idées creuses ? Et ne voyons-nous pas qu’il est des erreurs endémiques comme
- ↑ C’est à ces gens que s’adressent les Considérations sur la situation des Artistes.