Page:Liszt - Pages romantiques, 1912, éd. Chantavoine.djvu/81

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deux joues par les rois et les peuples, dans les antichambres et sur la place publique, cette église, disons-le sans détour, s’est entièrement aliéné le respect et l’amour de la société actuelle. Le peuple, l’art, la vie, se sont retirés d’elle ; et il semble que sa destinée soit de périr dans le délaissement et l’abandon[1] ! D’un autre côté le pouvoir temporel toujours plus ou moins ouvertement en état d’hostilité avec l’église, a définitivement divorcé avec elle en juillet. La royauté citoyenne et bourgeoise, économe, prudente par nature et par nécessité, forcée de défendre son terrain pied à pied, sans cesse chicanée, tracassée, harcelée de toute part, cette pauvre royauté n’a ni le temps ni la volonté de s’embarrasser des choses qui sont à la fois du domaine du culte et de l’art.

Au delà du Rhin, il est vrai, tous les principicules, ducs, grands-ducs, roitelets et potentats tiennent à honneur d’avoir une chapelle et des maîtres de chapelle[2]. Mais en France la loi étant athée, Sa Majesté Louis-Philippe qui ne va que peu ou point à la messe, a pensé avec raison qu’une chapelle était de trop, et que les musiciens devenaient des sinécuristes. Il s’est donc dépêché dès les premiers jours de son avènement au trône, de

  1. Cette diatribe contre l’église catholique est certainement inspirée à Liszt par l’excommunication de Lamennais.
  2. Spohr et Hummel sont attachés en cette qualité, le premier à la cour de Hesse, le second à celle de Saxe-Weymar, Haydn dirigeait la chapelle du prince Esterhazy. (Note de Liszt.)