Page:Littré - Pathologie verbale ou lésions de certains mots dans le cours de l’usage.djvu/38

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Flagorner. — Quelle que soit l’étymologie de ce mot, qui demeure douteuse, le sens ancien (on n’a pas d’exemples au delà du quinzième siècle) est bavarder, dire à l’oreille ; puis ce sens se perd, et sans transition, du moins je ne connais pas d’exemple du dix-septième siècle, on voit au dix-huitième flagorner prendre l’acception qui est seule usitée présentement. Quelle est la nuance qui a dirigé l’usage pour infliger au verbe cette considérable perversion ? Est-ce que, inconsciemment, on a attribué par une sorte de pudeur linguistique, à la flagornerie le soin de parler bas, de ne se faire entendre que de près et à voix basse ? Ou bien plutôt, est-ce que, la syllabe initiale fla étant commune à flagorner et à flatter, l’usage, qui ne sait pas se défendre contre ces sottes confusions, a cru à une communauté d’origine et de sens ?

Flatter. — Le latin avait blandiri, dont le vieux français fit blandir. Mais les couches populaires n’étaient pas un milieu où tous les beaux mots aient eu le droit ou la chance de pénétrer et leur parler, qui fit si souvent la loi, chercha un vocable qui fût plus à leur portée. Le germanique flat ou flaz, qui signifie plat, avait passé dans les Gaules. On en fit le verbe flatter, qui signifiait proprement rendre plat, puis alla figurément au sens de caresser comme avec la