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Page:Livre d'hommage des lettres françaises à Émile Zola, 1898.djvu/13

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Aussi, sa subite et révoltante impopularité ne m’impressionne guère. Et sa condamnation, mon premier mouvement d’indignation passé, me laisse indifférent. Ses accusateurs et ses juges ne se sont certainement pas doutés qu’en condamnant, ils ne faisaient que préparer l’avenir, consacrer son œuvre, élargir son champ d’action : trois-cent-soixante-cinq jours de prison non mérités peuvent contenir toute une éternité de gloire.


LE « SYNDICAT » GRANDIT

Il me semble que le « syndicat » grandit. La vertu de l’action est si grande que, des points opposés de l’horizon, d’Allemane à Gabriel Séailles, de Jaurès à Paul Desjardins, de Louise Michel à Duclaux, à Anatole France, à Eugène Carrière, à Claude Monet, les adhésions arrivent à Zola. Il faut le dire à leur honneur, les hommes de pensée se sont mis en mouvement d’abord. C’est un signe à ne pas négliger. Il est rare que, dans les mouvements d’opinion publique, les hommes de pur labeur intellectuel se manifestent au premier rang.

Le caractère de leurs travaux, leurs habitudes mentales, le genre de vie auquel ils sont tenus de s’astreindre, tout les éloigne des hommes d’action enclins à dépasser la mesure. Dans le cas présent, il semble qu’un lent travail se fût fait dans les esprits — obscur, car il n’est pas agréable de se donner l’apparence de défendre un traître — mais fiévreusement agité de doutes et d’angoisses.