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Page:Locke - Du gouvernement civil, 1795.djvu/292

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Du Gouvernement Civil,

mille. Après tout, les dommages que les hommes reçoivent les uns des autres dans l’état de nature (tous les Princes et tous les gouvernemens sont dans l’état de nature, les uns à l’égard des autres), ne donnent jamais à un conquérant le droit de déposséder la postérité de ceux qu’il aura subjugués, et de la priver de la jouissance de ce qui devoit être son héritage et l’héritage de tous ses descendans, jusqu’à la dernière génération. Les conquérans, à la vérité, sont fort disposés à croire qu’ils sont maîtres légitimes et perpétuels de tout : et telle est la condition de ceux qui sont subjugués, qu’il ne leur est pas permis de soutenir et de défendre leur droit. Il ne laisse pourtant pas d’être certain qu’en ces rencontres, les conquérans n’ont d’autre droit que celui qu’a le plus fort sur le foible : celui qui est le plus fort, est censé avoir droit de se saisir de tout ce qu’il lui plaît.

XI. Donc un conquérant, même dans une juste guerre, n’a, en vertu de ses conquêtes, aucun droit de domination sur ceux qui se sont joints à lui, et ont été les compagnons de ses combats, de ses victoires, ni sur les gens d’un pays subjugués qui ne se sont pas opposés à lui, ni sur la postérité de ceux