Page:Lombard - L'Agonie.djvu/10

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âges qu’il raconte. Mais il est impossible que personne ne soit frappé par la puissance de vision humaine, d’hallucination historique, avec laquelle ce cerveau de plébéien a conçu, a reproduit les civilisations pourries de Rome, sous Héliogabale, et de Byzance. C’est très grand et d’une monotonie splendide. Des théories d’hommes passent et repassent en gestes convulsés d’ovations, en belles attitudes martiales de défilés de guerre, en troublants cortèges de religions infâmes, en courses haletantes d’émeutes. Comment, par des mots, donner une idée de cela, qui est formidable ? C’est frénétique et morne ; tout un peuple d’ombres soulevé hors du néant.

L’Agonie, c’est Rome envahie, polluée par les voluptueux et féroces cultes d’Asie, c’est l’entrée, obscène et triomphale, du bel Héliogabale, mitré d’or, les joues fardées de vermillon, entouré de ses prêtres syriens, de ses eunuques, de ses femmes nues, de ses mignons ; c’est l’adoration de la Pierre noire, de l’icone unisexuelle, du phallus géant, intronisé, dans les palais et les temples, avec d’étonnantes prostitutions des impératrices et des princesses ; tout le rut forcené d’un peuple en délire ; toute une colossale et fracassante et ironi-