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Page:London - Belliou la fumée, trad. Postif, 1941.djvu/103

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BELLIOU-LA-FUMÉE

— Et moi je m’aperçois que vous êtes tous deux de fameux joueurs à ce jeu-là. Elle ajouta, avec une ombre de regret ! Quel dommage que vous ne soyez pas des vieux de la vieille ! »

Pendant deux heures encore ils suivirent le lit gelé de la rivière de Norvège, puis tournèrent dans une gorge sauvage et longèrent un mince affluent venant du Sud. À midi, ils commencèrent l’ascension des hautes montagnes. Derrière eux, en bas, la longue file des chercheurs d’or était en train de se briser : des colonnes de fumée, s’élevant de place en place, indiquaient qu’ils dressaient leurs campements.

Pour eux-mêmes l’avance était pénible. Vautrés dans la neige jusqu’à la ceinture, ils étaient obligés de s’arrêter tous les deux ou trois mètres pour respirer. Le Courtaud fut le premier à réclamer une halte.

« Nous sommes sur la piste depuis plus de douze heures, dit-il. La Fumée, je ne cache pas que je suis bel et bien fatigué. Et toi aussi, hein ? Pour sûr, je pourrais me cramponner à ce travail-là comme un Indien affamé à un morceau de viande d’ours. Mais la pauvre fille que voilà ne gardera pas longtemps ses jambes si elle ne se met pas quelque chose dans l’estomac. Voici un endroit où nous pourrions construire un feu. Qu’en dis-tu ? »

Ils s’y prirent avec tant de rapidité, d’adresse et de méthode pour établir ce campement temporaire, que Joy, tout en les observant avec des yeux jaloux, dut s’avouer que des vieux de la vieille n’auraient pas fait mieux. Des branches de sapin, sur lesquelles ils étendirent une couverture, fournirent un lit pour le repos et du combustible pour les opérations culinaires. Et ils eurent soin de ne pas s’exposer à la chaleur