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BELLIOU-LA-FUMÉE

derniers rameurs qui escaladèrent la barque furent trempés jusqu’à la ceinture, mais elle était à flot. Ils souquaient gauchement sur leurs lourds avirons et commençaient à s’éloigner de la rive. Cependant, à peine avaient-ils essayé de hisser une voile faite de couvertures, qu’elle fut emportée par un coup de vent, et pour la troisième fois l’embarcation fut balayée contre la grève en train de se congeler.

Kit grimaça à part lui et continua son chemin. Il venait de voir un échantillon de ce qui l’attendait dans son nouveau rôle d’homme à tout faire ; lui aussi devait démarrer aujourd’hui même avec un pareil rafiau.

Partout des travailleurs se démenaient à l’œuvre, car la chute de l’hiver était imminente, à tel point qu’on pouvait déjà parier si oui ou non ils parviendraient à franchir la longue chaîne des lacs avant le gel. Pourtant Kit, en arrivant à la tente de MM. Sprague et Stine, n’y perçut aucun mouvement.

Près d’un feu, à l’abri d’une bâche, était blotti un petit homme trapu qui fumait une cigarette de papier brun.

« Ah ! dit-il, vous êtes sans doute le nouvel homme de M. Sprague ? »

Kit fit signe que oui. Il avait cru noter une légère insistance sur les mots Monsieur et homme, et il avait sûrement saisi une lueur amusée au coin de l’œil de son interlocuteur.

« Eh bien ! reprit celui-ci, moi je suis l’homme du docteur Stine. J’ai cinq pieds deux pouces, je m’appelle le Courtaud, ou Jack Court, tout court, connu aussi parfois sous le nom de Jannot-un-peu-là. »

Kit lui serra la main.

« Avez-vous été nourri de viande d’ours ?