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BELLIOU-LA-FUMÉE

cette nuit dont il ne retenait que des souvenirs de cauchemar, Kit se demanda ce qu’avaient dû être les souffrances de Stine et de Sprague. Son unique impression personnelle était d’avoir lutté contre un froid mortel et une fatigue intolérable pendant un millier d’années ou peu s’en faut.

Le matin les trouva stationnaires. Stine et Sprague se plaignaient d’avoir, l’un les doigts gelés, l’autre le nez. Kit aussi, par les douleurs qu’il ressentait dans le nez et dans les joues, fut averti qu’il était atteint. Leur cercle visuel s’élargissait à mesure que grandissait la lumière, et ils constatèrent que le lac était gelé à perte de vue. L’eau avait disparu.

À une centaine de mètres s’élevait la rive de l’extrémité nord. Le Courtaud affirma que là se trouvait l’ouverture du fleuve et qu’il voyait de l’eau libre. Kit et lui étaient les seuls capables de travailler. Ils brisèrent la glace à coups de rames et forcèrent un passage au canot. Ils étaient à bout de leur dernier souffle quand ils sentirent l’aspiration du courant rapide. Un regard en arrière leur montra plusieurs embarcations, qui, après avoir lutté toute la nuit, se trouvaient irrémédiablement immobilisées. Puis ils tournèrent un coude, et le courant les emporta à une vitesse de dix kilomètres à l’heure.

VI

Jour par jour ils descendaient le courant rapide, et d’un jour à l’autre la glace en bordure des rives s’étendait en largeur. Quand ils voulaient camper au