Page:London - Croc-Blanc, 1923.djvu/126

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

à l’exception des tout petits, n’étaient pas moins chargés que les gens. Des sacs étaient liés sur leur dos et chaque bête portait un poids de vingt à trente livres. Croc-Blanc n’avait, auparavant, jamais vu de chiens, mais cette première vision lui suffit pour comprendre que c’était là un animal appartenant à sa propre espèce, avec quelque chose de différent. Quant aux chiens, ce fut surtout la différence qu’ils sentirent en apercevant le louveteau et sa mère.

Il y eut une ruée effroyable. Croc-Blanc se hérissa, hurla et mordit au hasard dans le flot qui, gueules ouvertes, déferlait sur lui. Il tomba et roula sous les chiens, éprouvant la morsure cruelle de leurs dents et, lui-même, mordant et déchirant, au-dessus de sa tête, pattes et ventres. Il entendait, dans la mêlée, les hurlements de Kiche qui combattait pour lui, les cris des animaux-hommes et le bruit de leurs gourdins dont ils frappaient les chiens, qui, sous les coups, gémissaient de douleur.

Tout ceci fut seulement l’histoire de quelques secondes. Le louveteau, remis sur pied, vit les Indiens qui le défendaient, repousser les chiens en arrière, à l’aide de bâtons et de pierres, et le sauver de l’agression féroce de ses frères qui, pourtant, n’étaient pas tout à fait ses frères. Et, quoiqu’il n’y eût point place en son cerveau pour la conception d’un sentiment aussi abstrait que celui de la justice, il sentit, à sa façon, la justice des animaux-hommes. Il connut qu’ils édictaient des lois et les imposaient.

Étrange était aussi la façon dont ils procédaient