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Page:London - Croc-Blanc, 1923.djvu/155

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dant quelque temps, suivi la rive en nageant, il se blottit dans un épais taillis et attendit.

Les heures passèrent et il les occupa à faire quelques sommes. Il dormait, quand il fut réveillé soudain par la voix de Castor-Gris, qui l’appelait par son nom. D’autres voix se joignirent à celle de son maître et il entendit que la femme de l’Indien prenait part à la recherche, ainsi que Mit-Sah, qui était le fils de Castor-Gris.

Croc-Blanc tremblait de peur. Mais, quoique une impulsion intérieure le poussât à sortir de sa cachette, il ne bougea point. Bientôt les voix se moururent au loin et, après une nouvelle attente de plusieurs heures, le louveteau rampa hors du taillis, afin de se réjouir librement du succès de son entreprise. Il se mit à jouer et à gambader autour des arbres. Cependant l’obscurité venait et voilà que, tout à coup, il eut conscience de sa solitude.

Il s’assit sur son derrière et se prit à réfléchir, écoutant le vaste silence de la forêt. Un trouble inconnu l’envahit. Il sentait le péril partout en embuscade autour de lui, un péril invisible et insoupçonné, qui se cachait dans l’ombre noire des troncs d’arbres énormes.

Il faisait froid aussi. Et il n’y avait plus ici les chauds recoins d’une tente où se réfugier. Le froid lui montait dans les pattes, et il s’efforçait de s’en garder en les levant successivement, l’une après l’autre. Ou bien il recourbait sur elles sa queue touffue, pour les couvrir. Tout ensemble repassait dans sa mémoire une succession d’images qui s’y étaient imprimées. Il revoyait le camp, ses tentes