Page:London - Croc-Blanc, 1923.djvu/182

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de la famine, il se rencontra avec Lip-Lip, qui avait aussi gagné les bois, où il traînait une existence misérable. Ils trottaient tous deux en sens opposé, à la base d’une des falaises qui bordaient le torrent. Inopinément, ils se trouvèrent nez à nez, à un tournant du roc. S’étant arrêtés, ils se mirent aussitôt en garde et se jetèrent un méfiant coup d’œil.

Croc-Blanc était en splendide condition. La chasse avait été bonne et, depuis huit jours, il s’était repu à gueule que veux-tu ? Son dernier meurtre n’était même pas encore digéré. Mais à l’aspect de Lip-Lip, ses poils se hérissèrent tout le long de son dos, d’un mouvement automatique, comme au temps des persécutions passées, et il gronda. Ce qui suivit fut l’affaire d’un instant. Lip-Lip essaya de fuir, mais Croc-Blanc, d’un coup d’épaule, le culbuta et le fit rouler sur le sol. Puis il plongea ses dents dans sa gorge. Tandis que son ennemi agonisait, il tourna en cercle autour de lui, pattes raides, et observant. Après quoi, il reprit sa route et s’en alla en trottant, le long de la falaise.

Peu après cet événement, il s’avança, sur la lisière de la forêt, dans la direction d’une étroite clairière qui s’inclinait vers le Mackenzie et où il était déjà venu. Mais, maintenant, un campement l’occupait. Il demeura caché parmi les arbres, afin d’étudier la situation. Spectacle, sons et odeurs lui étaient familiers. C’était l’ancien campement qui s’était transporté à cet endroit.

Spectacle, sons et odeurs différaient cependant du dernier souvenir qu’il en avait gardé. Il n’y