Aller au contenu

Page:London - En pays lointain.djvu/251

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
247
L’ABNÉGATION DES FEMMES

Je la fixai et lui dis :

— Les autres ont mal agi envers cet homme. Lui donnerai-je une partie de nos provisions ?

Je vis ses yeux briller d’une courte joie, mais elle examina longuement l’homme, puis moi. Ses lèvres se serrèrent avec une expression de dureté et elle répondit :

— Non. L’Eau Salée est bien loin, et la mort aux aguets. Il vaut mieux qu’elle enlève cet inconnu et épargne mon homme Charley.

L’homme s’éloigna dans le Silence, vers Pelly.

Cette nuit-là, Passuk pleura. Jamais je ne l’avais vue verser des larmes. Ce ne pouvait provenir de la fumée du feu, car le bois était sec. Je m’étonnai de sa tristesse, et je crus que son cœur de femme avait faibli devant le mystère de la piste et la souffrance.

La vie est une chose étrange. J’y ai souvent réfléchi et j’ai longuement médité sur elle ; cependant son secret, loin de s’éclaircir, ne fait qu’augmenter pour moi.

Pourquoi cette soif de vivre ?

C’est un jeu auquel personne ne gagne. Vivre, c’est peiner et souffrir jusqu’au moment où la vieillesse s’appesantit sur nous, et que, las, nous laissons tomber nos mains sur les cendres froides des feux éteints.

La vie est cruelle. C’est dans la souffrance que l’enfant aspire son premier souffle, et dans la douleur que, devenu vieux, il exhale son dernier sou-