Page:London - La Croisière du Dazzler', trad. Postif, 1948.djvu/55

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À la même seconde, Mrs Bronson échangea un regard avec Bessie, et cette jeune personne, bien qu’intriguée, s’empressa de se retirer.

Joë sut gré à sa mère à la fois de ce geste et de l’absence de tout commentaire sur sa mine. Son père l’avait certainement mise au courant. Il savait d’ailleurs qu’elle ne l’importunerait pas ; ce n’était pas dans ses habitudes.

Méditant ainsi, Joë expédia son déjeuner solitaire, vaguement conscient et ennuyé que sa mère pût se tourmenter à son sujet. Elle était toujours tendre, mais il remarqua qu’elle l’embrassait avec plus de tendresse que de coutume quand il s’en alla en balançant ses livres au bout d’une courroie ; il observa également, en tournant le coin de la rue, qu’elle le suivait des yeux derrière la fenêtre.

Mais ce qui l’horripilait en ce moment, c’était son ankylose et sa souffrance. Chaque pas lui coûtait un effort et une torture. Le soleil, dont les rayons se reflétaient sur le trottoir de ciment, provoquait des élancements dans son œil meurtri, il éprouvait mille douleurs dans tout le corps, mais il souffrait par-dessus tout dans ses muscles et ses jointures.

Jamais il n’aurait cru possible une pareille raideur. Chaque fibre de son corps protestait contre le moindre mouvement. Avec ses doigts enflés, c’était un supplice que d’ouvrir ou de fermer les mains ; quant à ses bras, ils étaient meurtris des poignets aux coudes, par suite des innombrables coups destinés à sa figure ou sa poitrine et qu’il avait parés avec les avant-bras.

Simpson-la-Brique était-il dans un état pareil ? La pensée de leurs mutuels tourments lui inspira une