Page:London - La Croisière du Dazzler', trad. Postif, 1948.djvu/80

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s’allongea sur ses couvertures et ne tarda pas à ronfler.

« Tu ferais bien de rentrer dormir au moins deux heures, lui recommanda aimablement Frisco Kid, en lui montrant la cabine qui lui était destinée. Nous allons peut-être rester debout le reste de la nuit. »

Joë obéit, mais il ne put s’endormir aussi facilement que les autres. Les yeux grands ouverts, il suivait du regard la marche des aiguilles du réveille-matin, songeant avec quelle rapidité les événements s’étaient succédé durant les dernières vingt-quatre heures. Le matin même, il était encore écolier. Et voici qu’il était matelot, embarqué sur le Dazzler pour une destination inconnue. À cette pensée, ce gamin de seize ans pensa en avoir vingt et être devenu tout à fait un homme… bien plus, un marin ! Si Charley et Fred avaient au moins pu le voir en ce moment ! Bah ! ils entendraient assez tôt parler de lui. Il lui semblait déjà surprendre leur conversation et voir les autres gamins accourir en foule autour d’eux :

« De qui parlez-vous ?

« — Oh ! de Joë Bronson. Il est parti en mer. C’était notre copain, vous savez ! »

Joë, plein d’orgueil, s’imaginait la scène. Puis il s’attendrit à l’idée que sa mère se tourmentait à son sujet, mais bientôt il se rendurcit au souvenir de l’auteur de ses jours. Non que son père se montrât méchant envers lui, mais, selon Joë, il ne comprenait rien à la jeunesse. Et c’était la source de tout le mal.

Ce matin même, n’avait-il point proclamé que le monde n’est pas un terrain de sport et que les gar-