Page:London - La Peste écarlate, trad. Postif et Gruyer, 1924.djvu/41

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— Et c’est là tout ce que tu faisais ? interrogea Hou-Hou. Parler, parler, parler, et rien d’autre. Qui donc chassait pour la viande ? Qui tirait le lait des chèvres ? Qui pêchait le poisson ?

— Bravo, Hou-Hou ! La question que tu me poses est tout à fait sensée. Eh bien, la nourriture, comme je te l’ai déjà dit, était pourtant très abondante. Car nous étions des hommes très sages. Quelques-uns s’occupaient spécialement de cette nourriture et les autres, pendant ce temps, vaquaient à d’autres occupations. Moi, je parlais, je parlais constamment. Et, en échange, on me donnait mon manger. Un manger copieux et délicat. Oh ! oui, délicat ! Jamais, depuis soixante ans, je n’en ai goûté de semblable, et sûrement je n’en goûterai jamais plus. J’ai souvent songé que l’œuvre la plus magnifique de notre ancienne civilisation était cette abondance de nourriture, sa variété infinie et son raffinement incroyable. Oh ! mes enfants ! La vie, oui, valait alors la peine d’être vécue, quand nous avions de si bonnes choses à manger !

Les gamins continuaient à écouter atten-