Page:London - La Peste écarlate, trad. Postif et Gruyer, 1924.djvu/78

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mettre le feu. Je n’allai au secours ni du marchand de chaussures ni de l’épicier. Le temps n’était plus où l’on se dévouait pour les autres. Chacun luttait pour soi.

« Tandis que j’allais rapidement, descendant une rue en pente, j’assistai à une autre tragédie. Deux vagues ouvriers avaient attaqué un homme et une femme bien mis, qui marchaient avec leurs enfants, et qu’ils prétendaient dévaliser. Celui que l’on assaillait ne m’était pas étranger, quoique je ne lui eusse jamais été présenté. C’était un poète connu dont, depuis longtemps, j’admirais les vers. J’hésitais à lui prêter main forte, lorsqu’un coup de revolver éclata, et je le vis s’effondrer sur le sol. Sa femme poussait des cris affreux. Une des deux brutes l’assomma d’un coup de poing. Je lançai des menaces aux bandits. Sur quoi ils déchargèrent leurs revolvers dans ma direction et je me hâtai de fuir, en tournant au premier coin.

« Mais là je fus arrêté par l’incendie. À droite et à gauche, les maisons brûlaient et la rue était pleine de flammes et de fumée. Quelque part, dans les rouges ténèbres, on