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autre cordage pareillement disposé, qu’il ne parvint pas davantage à hisser. Sans doute il s’agissait du canot de pêche au saumon.

— Si nous le rendions à son légitime propriétaire, ajouta-t-il, il y aurait cinquante dollars à partager.

Mais je professais à cette époque d’étranges notions sur l’honneur entre filous ; aussi je refusai de me mêler en quoi que ce soit à cette affaire.

D’autre part, French Frank s’était querellé avec Whisky Bob et ne s’entendait pas non plus avec Nelson. (Pauvre Whisky Bob ! C’était un être sans méchanceté, un caractère excellent et généreux. Né faible, élevé dans la pauvreté, incapable de résister aux exigences de son organisme pour l’alcool, il poursuivait encore sa carrière de pirate de la baie, quand son cadavre fut repêché, au bout de quelques jours, près du quai d’un bassin où il était tombé criblé de balles.)

Une heure ne s’était pas écoulée depuis mon refus d’accepter les propositions du capitaine Spink, que je vis celui-ci descendre jusqu’à l’estuaire, à bord du Reindeer avec Nelson. French Frank partait, de son côté, sur sa goélette.

Peu après, les deux embarcations remontaient l’estuaire, suivant des parallèles étrangement voisines. Comme elles se dirigeaient droit sur le banc de sable, on put bientôt apercevoir le canot submergé, dont les plats bords affleuraient la surface, suspendu par des cordes à la goélette et au sloop. La marée était à moitié basse. Ils s’avancèrent carrément sur le sable, et échouèrent leurs bateaux en ligne, le canot de pêche entre les deux.

Aussitôt, Hans, un des matelots de French Frank, sauta dans un canot et fila à toute allure vers la rive nord. Une grosse dame-jeanne à l’arrière expliquait