Aller au contenu

Page:London - Le Cabaret de la dernière chance, 1974.djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

l’autre. Je me dis souvent que je n’ai jamais été plus près de la mort. Mais je ne puis tabler que sur la narration faite par Nelson de ma conduite.

Consumé par un feu qui me rongeait intérieurement, je brûlais vivant dans un spasme de suffocation. Je voulais de l’air, j’en réclamais follement : je m’épuisais en vains efforts pour soulever un châssis, car toutes les fenêtres avaient été vissées. Nelson, habitué à voir des hommes ivres jusqu’à en perdre la raison, croyait que je voulais me jeter par la fenêtre. Il essayait de me retenir, mais dans ma résistance éperdue je saisis la torche d’un compagnon et brisai îa vitre.

Or, parmi les gens du port d’Oakland, il existait des clans pour et contre Nelson, et le wagon était plein de représentants des deux partis, qui tous avaient bu plus que leur compte. Le bris de la fenêtre fut comme un signal pour ceux de l’autre faction. L’un d’eux me frappa, m’abattit, et déchaîna la bagarre. Je n’ai rien su de tout cela que par ce qu’on m’en a raconté, et par la mâchoire endommagée dont je souffris le lendemain. L’homme qui m’avait frappé tomba en travers de mon corps, Nelson s’écroula pardessus lui, et il paraît qu’il ne resta guère de fenêtres intactes dans la voiture après îa mêlée générale qui s’ensuivit.

Le coup qui me laissa immobile sur le carreau était peut-être ce qui pouvait m’arriver de mieux dans la circonstance. Mes gesticulations n’avaient fait qu’accélérer les pulsations déjà dangereusement rapides de mon cœur, et augmenter le besoin d’oxygène pour mes poumons oppressés.

Une fois la bataille finie, je repris vaguement connaissance sans cependant revenir à moi.