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Page:London - Le Cabaret de la dernière chance, 1974.djvu/281

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qui se mettent à déraisonner très raisonnablement pour échapper au pessimisme qui résulte de l’exercice honnête mais intransigeant de la raison.

« Cette chair qui est la tienne, est-elle toi-même, ou n’est-ce qu’une chose étrangère que tu possèdes ? Ton corps, qu’est-ce que c’est ? Une machine à convertir des stimulations en réactions. Les unes et les autres persistent dans la mémoire et constituent l’expérience. Dans la conscience, tu es donc ces expériences. Tu es à tout moment ce que tu penses à ce moment. Ton Moi est à la fois sujet et objet ; il affirme certaines choses sur lui-même, et il est ce qu’il affirme. Le penseur est la pensée, le connaisseur est ce qui est connu, le possesseur est la chose possédée.

« Après tout, et tu le sais bien, l’homme est un flux d’états de conscience, un flot de pensées passagères ; chaque pensée de soi-même constitue un nouveau soi, des milliers de pensées, des milliers de soi, un devenir continuel qui n’est jamais, un feu follet dans une région de fantômes. Mais cela, l’homme ne veut pas l’accepter à propos de lui-même, il refuse de se soumettre à sa propre disparition. Il ne veut pas passer. Il veut revivre, quitte à mourir dans ce but.

« Il mélange des atomes et des jets de lumière, les nébuleuses les plus lointaines et les gouttes d’eau, des effleurements de sensations, des suintements de vase et les masses cosmiques, le tout bien brassé avec les perles de la foi, l’amour de la femme, des dignités imaginaires, des conjectures alarmées et de l’arrogance pompeuse ; et dans ce mortier il se construit une immortalité