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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/150

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LE LOUP DES MERS

il en est plus riche que vous. En face de lui, vous êtes un pauvre.

— Exact, très exact… riposta Loup Larsen. Je ne me perds pas dans les nuées. Je pense, avec l’Ecclésiaste, vous le savez, qu’un chien galeux vivant est supérieur à un lion mort. Ma doctrine est de survivre, à n’importe quel prix, aux embûches de la vie.

« Ce bout de ferment, au contraire, que vous appelez Johnson, à quoi sa noblesse morale, dont il est si fier, le conduira-t-elle ? À n’être plus que poussière et cendre, alors que moi, je serai toujours vivant. Savez-vous ce que je vais faire de lui ?

Je secouai la tête.

— Eh bien, je vais user de la prérogative que j’ai sur ce bateau. Vous allez m’entendre gueuler. Et vous verrez comment se comporte la noblesse morale de cet imbécile.

Ce disant, Loup Larsen quitta son fauteuil d’un bond, tel un tigre, et couvrit, le temps d’un éclair, la courte distance qui le séparait de Johnson.

Johnson essaya vainement d’éviter cette furieuse avalanche. Il abaissa une main pour protéger son estomac, et leva l’autre pour défendre sa tête.

Mais le poing de Loup Larsen passa entre les deux bras et s’abattit sur le thorax du matelot qu’il frappa d’un coup terrible. La respiration de Johnson fut coupée net, et ce qui lui restait de souffle fusa entre ses lèvres, avec un sifflement

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