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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/276

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LE LOUP DES MERS

Elle parlait d’une voix tranchante et impérative, et me regardait durement dans les yeux, comme si j’avais été coupable ou complice de cet acte.

— C’est parfaitement exact, répondis-je. Les deux hommes en question ont bien été assassinés.

— Et vous avez permis ça ?

— Je n’ai pas pu l’empêcher…, serait plus exact.

— Mais avez-vous tenté de l’empêcher ? (Elle appuya sur le mot « tenté ».) Mais non ! Pourquoi n’êtes-vous pas intervenu ?

Je me gardai de m’emporter et c’est avec une grande douceur que je répondis :

— Miss Brewster, vous êtes une nouvelle venue dans notre petit univers et vous ne comprenez pas encore les lois qui le régissent. Il faut en tenir compte pour juger sainement des choses.

« Vous avez apporté avec vous certaines conceptions d’humanité et de beauté morale qui n’ont pas cours ici, où elles sont tenues pour idées fausses. Moi aussi, j’ai mis du temps à le constater. Mais à présent, j’en suis bien persuadé.

Elle secoua la tête, d’un air incrédule.

— Que me conseillez-vous ? demandai-je. De prendre un couteau, un fusil, une hache, et de tuer Loup Larsen ?

Elle recula, effrayée.

— Non pas ça !

— Alors quoi ? Vous préférez que je me tue ?

— Vous parlez de solutions extrêmes. Mais le courage, ça existe. Il ne reste jamais sans effet.

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