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Page:London - Le Loup des mers, 1974.djvu/420

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LE LOUP DES MERS

« Pas constamment. »

Sa main se mouvait avec lenteur et trébuchait péniblement sur le papier. Ce ne fut qu’avec une extrême difficulté que nous déchiffrâmes ce griffonnage. Il rappelait, d’aspect, ces « messages de l’au-delà » dont les spirites gratifient les spectateurs, dans les séances publiques à un dollar d’entrée.

« Mais je suis toujours là… » écrivit-il encore.

Le crayon lui tomba de la main, où nous dûmes le replacer entre ses doigts.

« Je médite avec sérénité sur la vie et sur la mort, comme un Sage hindou, quand je ne souffre pas », écrivit-il.

— Vous croyez donc, lui cria Maud dans l’oreille, à l’immortalité ?

Par trois fois, Loup Larsen tenta d’écrire, mais sans résultat. Le crayon glissa sur le papier. Comme précédemment, j’essayai de le remettre dans sa main, mais ses doigts ne pouvaient se refermer.

Alors Maud maintint le crayon dans la main inerte, et Loup Larsen écrivit, en grandes lettres, si lentement que plusieurs minutes s’écoulèrent entre chacune d’elles :

« FOUTAISE ! »

Ce furent, si l’on peut dire, les dernières paroles de Loup Larsen, indomptable et sceptique jusqu’au bout.

Le bras et la main se détendirent, et le crayon

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