Page:London - Le Tourbillon, trad Postif, 1926.djvu/23

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extrémité de la salle. C’est Billy Roberts. Bert avait dit qu’il viendrait. Il t’offrira à dîner, et Bert m’invitera aussi. Ça va être une journée superbe, tu vas voir. Bon sang ! pourvu que la musique dure jusqu’à ce que nous revenions à l’autre bout !

Elles se rapprochèrent en dansant, attentives à capter les hommes et le dîner. Elles dansaient certainement bien, ces deux fraîches jeunesses, et elles furent délicieusement surprises quand le dernier flot de musique les déposa à dangereuse proximité de leur désir.

Bert et Marie s’abordèrent par leurs petits noms, mais Saxonne donna du « Monsieur Wanhope » à Bert, malgré qu’il l’eût saluée de son prénom. La seule présentation fut celle de Saxonne et Billy Roberts. Marie s’en acquitta en coup de vent, avec une nervosité insouciante.

— Monsieur Roberts… Mademoiselle Brown, ma meilleure amie. Son petit nom est Saxonne. N’est-ce pas un amour de prénom ?

— Je le trouve très bien, répondit Billy, chapeau bas et main tendue. Charmé de faire votre connaissance, Mademoiselle Brown.

Pendant qu’ils se serraient les mains, elle sentit sur la sienne les callosités de la paume du charretier, et ses regards rapides saisirent une vingtaine d’autres détails. Quant à lui, il ne remarqua guère que ses yeux, qui lui semblèrent vaguement bleus ; c’est seulement plus tard dans la journée qu’il se rendit compte qu’ils étaient gris. Elle, au contraire, vit tout de suite ses yeux à lui tels qu’ils étaient, d’un bleu profond, larges et beaux comme ceux d’un enfant boudeur. Ils regardaient bien en face et elle les aima, comme elle avait aimé sa main en l’entrevoyant et en la pressant. Du même coup d’œil, mais moins nettement, elle avait observé le nez court et bien planté, la teinte rose des joues, la fermeté d’une lèvre supérieure un peu mince ; puis son attention s’était concentrée avec plaisir sur la bouche grande et