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Page:London - Le Vagabond des étoiles.djvu/150

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LE VAGABOND DES ÉTOILES

fusils et les déposer dans un des chariots. Le prétexte invoqué était que nous ne devions pas exciter l’animosité des Indiens. En agissant ainsi, nous aurions l’air, pour eux, d’être les prisonniers de la milice des Mormons, et ils nous laisseraient partir sans récriminer.

Mon père parut se raidir contre une semblable demande et se préparait à refuser. Il échangea un regard avec Laban, qui lui répondit, à voix basse :

— Ils ne nous seront pas plus utiles entre nos mains que dans les chariots, puisque nous n’avons plus de poudre.

Deux de nos blessés, qui ne pouvaient pas marcher, furent montés dans un des deux chariots amenés par Lee, et qui avaient chacun un homme pour les conduire. Avec eux y furent placés les petits enfants. Lee semblait les trier au-dessus et au-dessous de huit ans. Jed et moi, nous avions neuf ans et, de plus, étions plutôt grands pour notre âge. Aussi Lee nous rangea-t-il dans le groupe des plus âgés, en nous disant que nous devions aller à pied, avec les femmes.

Quand il prit notre bébé des bras de ma mère et le plaça dans le chariot, elle protesta tout d’abord. Puis je la vis qui se mordait les lèvres, et elle laissa faire. C’était une femme d’âge moyen, aux yeux gris et aux traits dure, à la forte ossature, et qui avait eu, jadis quelque embonpoint. Mais le long voyage et les privations subies avaient marqué sur elle leur empreinte. En sorte que ses joues s’étaient creusées, qu’elle avait maigri et que, comme toutes les autres femmes de la caravane, son visage avait pris une expression pensive et angoissée.

Lee décrivait ensuite quel devait être l’ordre de la marche. Il dit que les femmes, et les enfants qui chemineraient avec elles, iraient les premiers, à la file, derrière les deux chariots. Ensuite viendraient les hommes, un par un.

À l’ouïe de ces paroles, Laban vint vers moi, détacha