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LE VAGABOND DES ÉTOILES

mes vies. Elle est mon héritage catastrophique, qui date du temps où de vagues formes visqueuses précédaient l’origine du monde.

Il est temps, maintenant, lecteur, que je t’apprenne qui je suis. Non, non, je ne suis pas fou. Cela, il est nécessaire que tu en sois bien persuadé, pour croire ensuite ce que je vais te conter.

Je suis Darrell Standing. À ce nom, les quelques-uns d’entre vous qui m’ont connu me reconnaîtront sans peine. Aux autres, qui sont la majorité, permettez-moi de me présenter.

Il y a huit ans, je professais l’agronomie au Collège d’Agriculture de l’Université de Californie, à Berkeley. Alors la somnolence de cette paisible petite ville fut secouée par un événement imprévu, l’assassinat du professeur Haskell, dans un des laboratoires d’une des sections du dit Collège. Darrell Standing était l’assassin.

Je suis Darrell Standing. On m’arrêta, les mains encore teintes de sang. Je ne discuterai pas sur la question de savoir qui du professeur Haskell ou de moi avait, dans notre querelle, tort ou raison. Cela ne regarde personne. Le fait brutal est que, dans une vague de colère, de cette colère rouge qui a été mon fléau à travers les âges, j’ai tué mon collègue. Les rôles du tribunal témoignent que j’ai accompli cette action. Pour une fois, je suis d’accord avec eux.

Ce n’est pas pour ce meurtre, cependant, que je vais être pendu. Non. Comme châtiment, je fus condamné à la prison pour la vie. J’avais trente-six ans à cette époque. J’en ai quarante-quatre à présent.

Les huit années intermédiaires, je les ai vécues dans la prison d’État de Californie, à San Quentin. Cinq de ces années, je les ai passées dans les ténèbres d’un cachot. C’est ce qu’on nomme, dans le langage des lois, la détention solitaire. Les hommes qui l’endurent l’appellent « la mort vivante ».

Durant ces cinq années, pourtant, j’ai réussi à m’éva-