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LE VAGABOND DES ÉTOILES

Tandis qu’on me poussait, tout chancelant, dans les corridors, il me jeta :

— Eh bien, frère, tu le vois, que tu n’en es point mort et que tu remues encore.

— Toi, Red, ferme ça ! grogna le sergent.

— Oublie ce mauvais quart d’heure ! reprit Red.

Le sergent se fâcha. Il menaça :

— Red ! J’aurai raison de toi !

— Crois-tu ? riposta Philadelphie Red, avec douceur.

Puis sa voix soudain se fit rauque et sauvage :

— Tu n’es qu’un propre à rien, abruti ! Livré à toi-même, tu aurais été incapable, dans la vie, de te gagner jamais un déjeuner, et encore moins d’obtenir la place que tu occupes ici. C’est ton père qui t’a poussé. Et l’on sait par quels procédés infects ton père a lui-même fait sa situation !

La scène était grandiose. L’homme torturé s’élevant au-dessus de son bourreau et bravant les coups auxquels il s’exposait.

Puis, se retournant vers moi :

— Au revoir, frère ! dit Philadelphie Red. Au revoir et conduis-toi bien désormais. Aime bien notre gouverneur. Si tu as l’occasion de le rencontrer, ne manque pas de lui conter que tu m’as vu et que, dans la camisole, je n’ai pas flanché…

Le sergent était pourpre de rage et ce fut moi qui payai, de plusieurs horions et coups de pied, pour les quolibets de Philadelphie Red.