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UNE TRANCHE DE BIFTECK

lents et inefficaces, il ne fit que parer, se maintenir en place et se coller dans un corps à corps. Sandel voulait accélérer l’allure, et King, par prudence, l’en empêchait. Le vétéran souriait avec une sorte de souci pathétique et ménageait sa force avec une jalousie dont est seule capable la maturité.

Sandel représentait la jeunesse et gaspillait ses forces avec la magnifique prodigalité de son âge. King dirigeait l’assaut en chef consommé, avec la sagesse acquise au prix de longues et cruelles mêlées. Il observait tout, la tête et les yeux froids, avec des mouvements lents, attendant que Sandel eût jeté sa gourme. Pour la majorité des spectateurs, King n’était pas de force, et ils exprimaient leur opinion en offrant trois contre un sur Sandel. Mais un petit nombre de sages, qui connaissaient King de longue date, acceptaient le pari, qu’ils considéraient comme gagné d’avance.

La troisième reprise débuta, comme les autres, tout à fait partiale ; Sandel faisait tout, menait la partie et accablait de coups son adversaire. Une demi-minute s’était déjà écoulée quand Sandel, trop confiant en lui-même, se découvrit. Les yeux de King flambèrent en même temps que se détendait son