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POUR LA RÉVOLUTION MEXICAINE

certaines scènes aussi distinctement qu’à l’époque où il les avait vécues.

Il revoyait les usines hydrauliques, aux murs blancs, de Rio-Blanco, les six mille ouvriers hâves et affamés, hommes et femmes, et les petits enfants de sept et huit ans qui peinaient à la tâche pendant de longues journées pour dix cents par jour. Il revoyait ces cadavres ambulants, les têtes spectrales et squelettiques des hommes qui trimaient dans les ateliers de teinture, ces « trous à suicides », comme les appelait son père, où la camarde vous terrassait au bout d’un an. Il revoyait la courette de leur maison, sa mère vaquant aux soins de la cuisine et aux grossières besognes du ménage, et trouvant le temps, dans cet esclavage, de lui prodiguer de l’affection et des caresses. Il revoyait aussi son père, grand gaillard à fortes moustaches et à large poitrine, la bonté même, qui, aimant tous ses semblables, trouvait encore assez de place en son cœur pour adorer sa femme et son enfant, ce petit muchacho, qui jouait dans un coin de la cour. À cette époque, il ne s’appelait pas Felipe Rivera, mais Fernandez, comme son père et sa mère et Juan était son prénom. Plus tard, il avait de lui-même