par journée, soit, en dix jours, trois cent soixante mille, et, en un mois, un million quatre-vingt mille gestes. Négligeons les quatre-vingt mille, — et il parlait avec la bienfaisance complaisante d’un philanthrope, — reste un million de mouvements par mois, c’est-à-dire douze millions de mouvements par an.
« Aux métiers, j’en faisais le double, soit vingt-cinq millions de mouvements par an, et il me semble que je m’agite comme cela depuis un million d’années.
« Or, cette semaine, je n’ai pas bougé du tout. Voici des heures et des heures que je ne fais pas un seul geste. Et je trouve magnifique de rester assis là à ne rien faire pendant des heures et des heures. Jamais auparavant je n’avais goûté le bonheur : je n’en avais pas le loisir. J’ai remué tout le temps : ce n’est pas le moyen d’être heureux, et je ne remuerai plus. Désormais je m’immobilise, je m’assois, je me délasse, je me repose encore, et je recommence à me reposer !
— Mais que vont devenir Will et les enfants ? demanda-t-elle avec désespoir.
— Ah, voilà ! Will et les enfants, répéta-t-il, sans la moindre amertume dans la voix.