Page:London - Les Vagabonds du rail, 1974.djvu/124

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Voici comment j’eus la preuve qu’on faisait commerce d’argent dans le pénitencier. Pendant un certain temps je fus compagnon de cellule du troisième homme de hall. Il possédait plus de seize dollars. Chaque soir, vers neuf heures, lorsqu’on avait poussé les verrous, il avait l’habitude de compter son gain. Et chaque soir, il ne manquait pas de me prédire la vengeance qu’il m’infligerait si j’osais le vendre aux autres prévôts. Il redoutait d’être volé, et le danger imminent s’annonçait de trois côtés différents. D’abord les geôliers. Un couple de ceux-ci pouvaient sauter sur lui, le rouer de coups pour insubordination, et le jeter au « solitaire » (le cachot) ; dans la mêlée ses seize dollars prendraient des ailes. Ensuite, le premier homme de hall pouvait les lui soustraire en le menaçant de lui supprimer son emploi et de le renvoyer aux travaux forcés dans la cour de la prison. Puis enfin, il fallait compter avec les dix prévôts ordinaires. S’ils avaient vent de sa fortune, il courait de fortes chances qu’un beau jour toute la bande l’acculât dans un coin et le soulageât de son magot. Oh ! nous étions de véritables