Page:London - Les Vagabonds du rail, 1974.djvu/40

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À l’arrêt suivant, je comptai les coureurs qui prenaient du champ. Il n’en restait que quinze : cinq avaient été délogés.

L’extermination dignement commencée devait se poursuivre de gare en gare. Nous ne fûmes plus que quatorze, puis douze, puis onze… neuf… huit. Je songeais aux dix négrillons de la chanson et m’affermissais dans la résolution de demeurer de dernier de tous. Pourquoi pas ? N’étais-je pas gratifié de vigueur, d’agilité et de jeunesse, dans le plein épanouissement de mes dix-huit ans ? Ne possédais-je pas tout mon ressort ? Après tout, n’étais-je pas un « roi du trimard » ?

Comparés à moi, les autres ne représentaient que des novices, des pieds tendres, des amateurs. Si j’étais incapable de rester le dernier négrillon, autant valait lâcher la partie et m’embaucher n’importe où, voire dans une plantation d’alfa.

Quand notre nombre eut été réduit à quatre, toute l’équipe du train commença à prendre de l’intérêt à la compétition. Dans cet assaut d’adresse et de stratégie, les employés avaient les atouts en mains. Un par un, je portai manquants les trois autres survivants, et enfin je demeurai seul.