Page:Londres - Au bagne.djvu/144

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Et les libérés, le ventre creux, regardant passer le bois.

Chez les particuliers ? Les particuliers sont peu nombreux. Il y a ici, dix assassins et quinze voleurs pour un simple citoyen. Et puis les particuliers ont des « assignés » : des forçats de première classe employés en ville.

Dans les comptoirs ? Oui, quelques-uns travaillent dans l’importation et l’exportation, mais quelques-uns seulement, parce qu’il n’y a que quelques comptoirs.

Alors que font-ils ?

1o Ils déchargent deux fois par mois, les cargos américains et français qui apportent des vivres.

2o Ils mangent — je veux dire ils boivent — en un jour et une nuit les cinquante francs guyanais qu’ils viennent de gagner.

3o Ils se prennent de querelle et l’on entend ce cri qui ne fait même plus tourner la tête aux passants : Ah ! Ahn ! Ah ! Ahn ! C’est un libéré qui vient de recevoir un couteau dans le ventre.

4o Ils « font » la rue Mélinon comme des bêtes de ménagerie derrière leurs barreaux, avant l’heure du repas. Mais pour eux, le repas ne vient pas.

5o Le samedi, ils vont au cinéma. Les vingt sous du cinéma sont sacrés. Ils mourront de faim devant ce billet, mais ils iront au cinéma.

6o À onze heures du soir, ils se couchent sous le marché couvert et, avant de s’endormir sur le